J'allaite et/donc je fusionne?
Après 10 semaines d'allaitement intensif (le Poupon tient toujours son rythme de croisière avec une tétée toutes les deux/trois heures), j'affirme que cela me rend totalement fusionnelle, que cela monopolise toutes mes calories (enfin, pas mal de mes calories), mon énergie et aussi mes neurones.
Je prends rendez-vous à la banque? un frisson me parcourt, je sens que j'ai froid. Mon sein coule, mon tee-shirt et mon pull portent de grosses auréoles. Je m'excuse auprès de la banquière qui visiblement n'avait pas allaité ses enfants.
Je fais le plein de courses chez Edouard L.?je ressens une douleur dans la poitrine : je sais à quelle heure mange mon Poupon.
Je le laisse trois heures, je suis obligée de tirer mon lait plus d'un quart d'heure pour remplir deux biberons, les vider et les remplir une nouvelle fois (à demi) pour ne pas laisser la migraine d'installer.
Les forces de l'entourage sont vives pour me faire arrêter, diminuer. En effet, je réalise, pour ce second enfant que l'allaitement est un état d'esprit. Il faut envisager de n'être qu'une maman, de se consacrer totalement à son enfant, d'être rattrapée par sa présence, sa faim. Faire face aux incompréhensions, inquiétudes (le poids trop élevé ou à l'inverse trop faible, la fatigue de la maman). Il faut apprendre à serrer les dents quand on voudrait passer le relais. Se mettre à la place du Papa qui a beaucoup plus de mal à se faire une place dans le couple maman/bébé, et qui se trouve souvent relégué à la corvée du change (au cours de laquelle, heureusement pour lui, le Poupon s'éclate vraiment).
Bien sur le Petit est plus cool et plus "facile" que ne l'était l'aîné pour lequel j'ai introduit un biberon de lait maternisé dès la fin du premier mois (même si je l'ai allaité 4 mois) mais je ne peux m'empêcher de penser que l'allaitement intensif accroît la fusion fait sourire plus vite mon poupon dès qu'il entend le son de ma voix, le fait me dévorer des yeux (au grand étonnement des passants) quand je le promène. Plus le temps passe, plus il m'apparaît impossible d'envisager un sevrage proche (et précoce).
Pourtant, je suis dépitée face à mon manque d'ouverture au monde, à l'actualité, à la littérature, et à tout ce qui m'anime ordinairement. Mais je n'en ai ni le loisir, ni le temps, ni l'envie et j'ai vraiment l'impression de découvrir ce qu'est réellement l'allaitement maintenant, n'en déplaise à ceux et celles qui alimentent le débat pro-allaitement ou pro-biberon!